« Bonjour,
J'ai [XX] ans, vierge et très timide. Je me masturbe souvent en pensant ou en regardant du porno gay. J'y pense tous les jours, mais j'ai peur de franchir le pas, donc je reste seul et je me
renferme sur moi.
Que puis-je faire ? »
Réponse du psy :
Bonjour,
Vous expliquez être vierge, et peut être gay, car vos fantasmes apparents, vous portent à regarder du porno.
Manifestement, cette situation vous ennuie désormais. Vous n'arrivez pas à franchir le pas puisque vous dites en avoir peur. Cependant de quel peur peut-il bien s'agir pour vous et aussi quel pas
souhaitez vous franchir ? Celui de rompre avec la virginité (et là aussi l'interrogation sur la virginité au regard de l'homosexualité est à interroger), ou est-ce le pas lié à l'affirmation
ouverte de votre homosexualité ? Il y a de multiples façons d'affirmer son homosexualité, et/ou de vivre sa sexualité, qu'elle soit homo, hétéro, bisexuelle, ou autre.
Quelles sont celles qui vous conviendraient le mieux, idéalement et concrètement ?
Est-ce uniquement une recherche de sexualité homo, que vous souhaitez affirmer, ou y a t-il aussi une envie amoureuse ? Y a-t-il eu pour vous d'autres formes de sexualité déjà tentées, ou
imaginées, et si oui qu'elles en ont pu être les ressentis et les éprouvés pour vous ? Quelles ont été vos relations amoureuses auparavant ?
Puis, il y a la question de l'entrée dans une sexualité par la voie du porno que vous interrogez ici. C'est-à-dire l'entrée dans la sexualité par le biais de la compétition, de la comparaison, de l'exploit, et peut-être ainsi par une pression imaginaire que l'on se donne, ou se propose d'égaler, ou au moins d'avoir en tête comme indicateur de ce qui devrait être fait, et du comment cela devrait être fait. Ce qui peut être une des origines de la source de peur ou d'angoisse que vous évoquez. Le porno, qu'il soit amateur ou professionnel fait entrer dans une imagerie de rapports "faciles" possibles à l'autre, par un effet de distorsion et d'évacuation de la rencontre.
C'est votre « je me renferme sur moi » qui me porte à cette réflexion.
Votre sexualité en solitaire ne semble pas vous satisfaire, vous souhaitez apparemment une rencontre.
Or la rencontre est le plus souvent ce qui est précisément occultée dans le porno, ou très vaguement abordée. Et cela incite à croire qu'il n'y a qu'un seul but vraiment essentiel dans le "rapport" à l'autre se serait celui de l'acte. Commencer une rencontre avec en tête l'idée que l'on devra « y passer », fait souvent perdre tous les moyens pour une découverte de l'autre, exempte de préjugés.
Je ne dis pas qu'il n'y a pas d'acte sexuel possible à avoir en tête avec un autre qui nous plairait. Mais je dis plutôt que le seul acte sexuel qu'il y aura est à découvrir au fur et à mesure d'une découverte au quotidien de telle ou telle personne en particulier. Le porno n'aidant pas à la rencontre de l'autre, mais plutôt tend à rabaisser les différences. tous les pornos se ressemblent.
S'il y a un lieu où les préjugés et les a priori psychologiques se doivent d'être interrogés, c'est bien lors de la rencontre inouïe, unique, d'une personne avec une autre personne. C'est-à-dire qu'il me semble nécessaire que les fantasmes issus de la pornographie ne soient pas là pour suppléer la timidité, la délicatesse, l'émotion ressentie et interprétée qu'imposent la rencontre avec quelqu'un.
Enfin, cela renvoie à votre interrogation première "suis-je gay" ? qui peut être une première étape pour aborder ces questions. A savoir qui êtes-vous, pour vous, avant tout ? Êtes-vous uniquement gay ?
Ce sont me semble-t-il des interrogations, et des pistes de réflexion, parmi d'autres, que vous pourriez aborder au cours d'un travail psychothérapique, soit en-ligne, soit en présentiel. Un
travail qui n'aura pas forcément, dans un premier temps, besoin de nombreuses séances.
Ceci afin de faire un point sur vos envies, de les décanter et les délier des impératifs socio-économiques de la performance, afin de découvrir ce que souhaite votre système de valeur dans la
perspective d'une rencontre, avec votre sexualité certes, mais aussi avec quelqu'un à aimer, pour que vos deux sexualités puissent tenter de s'y rencontrer.
Enfin, n'oubliez pas que la confidentialité fait partie de l’éthique des psychothérapeutes.
Bien à vous »